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3. Réflexion en eaux profondes : les terres rares.

L’océan profond… Vaste sujet. L’océan profond, est la zone aphotique, c’est-à-dire où la lumière ne pénètre plus, au-delà de 200 ou 300m de profondeur. Il couvre deux tiers de notre planète et représente en volume 93% de la biosphère !La profondeur y est de 3800m en moyenne et peut dépasser 11 km. Le plus souvent, ces zones coïncident avec le terme légal « haute mer 1 »et sont donc soumises à une juridiction internationale en construction mais une partie non-négligeable se trouve dans les zones économiques exclusives nationales (ZEE). La France avec les DOM-TOM possède dans sa ZEE une part importante d’océans profonds, presque la moitié se trouvant au large de la Polynésie. L’Europe en général avec les RUP (Régions Ultra Périphériques), tient une place importante dans la gestion de ces zones.

Il ne s’agit pas de « déserts de vie » comme le souligne Daniella Zepilli. Au contraire, des hotspots de biodiversité sont identifiés sur les monts sous-marins qui peuvent se situer en profondeur. Les espèces présentes sont surprenantes et encore peu connues. D’autres points chauds, les fumeurs noirs abritent des écosystèmes aux propriétés exceptionnelles qui impliquent des adaptations majeures de la part des organismes présents. Les grands fonds présentent des conditions défavorables à la vie (absence de photosynthèse). La production d’énergie primaire y vient de la chimiosynthèse microbienne. Les animaux adaptés sont autant de pistes pour explorer la présence de vie sur d’autres planètes. Ils résistent à de fortes pressions et de basses températures. Bien que peu connus, à cause de notre difficulté à atteindre de telles profondeur avec les appareils de mesures adaptés, les grands-fonds sont connectés par la colonne d’eau à tout l’océan et subissent également les changements auxquels la planète fait face. Des méthodes récentes telles que les reconstitutions 3D, l’analyse de l’ADN environnemental (eDNA) ou l’intelligence artificielle offrent des perspectives encourageantes pour la compréhension de ces écosystèmes instables et variés.

L’’exploitation des ressources minérales qui s’y trouvent est en réflexion. Un travail d’exploration a déjà commencé. Les sulphides polymétalliques des fumeurs noirs, les encroutements très riches en minerais de Polynésie Française, ou encore les Nodules polymétalliques des plaines abyssales comme à Cliperton, sont autant de richesses attrayantes dont nous connaissons l’existence. A l’heure actuelle, la France dispose de deux permis d’exploration dans ces zones. La question de l’exploitation s’avère sensible : d’une part, un manque à venir de matériaux potentiellement disponibles dans les océans encourage la prospection, dans un contexte où la Chine détient le quasi-monopole des terres rares extraites. D’autre part, notre méconnaissance des écosystèmes potentiellement endommagés incite à la précaution. Cette tension se ressent dans le discours de Charlotte Sapin, représentante de l’AIFM (autorité internationale des fonds marins). Elle rappelle qu’aucune exploitation minière n’a commencé en haute mer. Actuellement 30 contrats d’exploration sont autorisés sur 0,3% des océans mondiaux (1,3 millions de km2). Le code minier en construction doit règlementer ces activités avec une place prépondérante accordée aux considérations environnementales. En respect de ce règlement, l’exploitation pourra commencer. Le WWF demande un moratoire sur cette exploitation invoquant notre incapacité à évaluer correctement le risque de destruction d’écosystèmes et de pertes d’espèces encore inconnues. « La plupart des citoyens ne sont pas au courant des impacts ». L’ONG souligne la contradiction à vouloir inscrire l’économie dans un mode circulaire tout en favorisant l’extraction de minerais produits sur des échelles de temps géologique par rapport à leur recyclage. Dans notre économie linéaire actuelle, 92% des ressources ne sont pas recyclées.

Tous les partis s’accordent sur un manque de données à combler impérativement et attendent beaucoup de la recherche scientifique pour combler cette lacune. La richesse des océans profonds est un trésor que nous découvrons peu à peu. Pour l’heure, 95% des grands fonds sont totalement méconnus.

1Voir 4. Le traité sur la haute mer